Dans ce nouveau billet de blog, je m’attache à répondre aux questions de deux de nos anciennes participantes : Elisabeth et Nadine 🙋🙋
Elisabeth pose la question de la légitimité : qui suis-je pour prétendre vouloir écrire un livre ?
Nadine se demande comment ôter ses doutes. Comment dépasser ces moments où on a l’impression de ne pas être sur la bonne voie et quand on se relit, l’envie nous prend de tout jeter à la poubelle !
Ces deux questions, a priori différentes, recoupent pourtant le même sujet : suis-je capable d’écrire un livre et ce livre intéressera-t-il quelqu’un ?
Exprimer sa vérité, sa vision du monde
Ecrire, c’est mettre en mots notre vision du monde, comment nous voyons les choses, avec notre sensibilité, notre vécu, notre spécificité. Chacun de nous a le droit de vouloir exprimer sa vérité. Nous sommes tous légitimes à vouloir mettre des mots sur nos expériences, car celles-ci sont uniques.
Je suis personnellement convaincue qu’écrire fait de nous des êtres meilleurs. Parce que l’écriture est une discipline exigeante, elle nous tire vers le haut, nous amène à persévérer, à nous dépasser, à être d’éternels apprenants, à faire preuve d’humilité et à devenir plus patients. L’écriture nous pousse à éclaircir notre pensée, à chercher le mot juste, à fournir toujours plus de travail pour exceller.
Quels prérequis pour écrire un livre ?
Bien entendu, la maîtrise de la langue est un prérequis si nous voulons nous exprimer à l’écrit et souhaitons être lus par les autres.
Au-delà de la compétence linguistique, la connaissance et l’application de techniques de la narration, telles que :
La recherche d’une thématique forte (le fil conducteur, que j’appelle aussi « le message » dans mes ateliers d’écriture) ;
La construction d’une intrigue ;
La création de personnages denses et attachants ;
Le choix d’un point de vue narratif ;
L’écriture de dialogues crédibles ;
etc.
sont également nécessaires pour commencer et terminer l’écriture d’un livre. Mais ces techniques peuvent s’apprendre.
Si nous maîtrisons donc la langue (ou que nous faisons notre maximum pour la maîtriser), que nous sommes prêts à apprendre les rouages de l’écriture et à travailler pour les appliquer, que nous avons une vision, un message unique à faire passer, alors oui, nous sommes légitimes à vouloir écrire un livre.
D’où viennent les doutes ?
Ce qui crée les doutes, cette remise en question sur sa légitimité, ce sont principalement deux facteurs :
Chez certains individus, il s’agit du manque de confiance en soi, intrinsèque à la personne, qui ne touche pas que le domaine de l’écriture, mais tous les aspects de la vie ;
Chez d’autres, et le plus souvent, il s’agit du décalage entre l’ambition recherchée et sa capacité à l’instant T.
Pour ce qui est de la confiance en soi, un travail sur soi s’impose. Mais nous sortons ici du cadre de l’écriture, donc je ne m’avancerai pas à donner de conseils.
Développons en revanche la deuxième explication : le décalage entre son ambition et sa capacité.
Une erreur courante consiste à se répéter en boucle : « Quand je lis mon auteur préféré, je me dis que je suis loin d’être à la hauteur pour écrire un livre moi aussi ».
Cette pensée est fréquente et normale, car elle est tout simplement le reflet d’une réalité : effectivement, aujourd’hui, nous ne sommes pas à la hauteur des auteurs que nous admirons. Mais n’oublions pas que :
Nous n’avons pas (encore) la même pratique, expérience et expertise que les grands auteurs.
Victor Hugo, par exemple, n’est pas devenu un géant de la littérature du jour au lendemain. Nous connaissons ses œuvres magistrales, mais nous ignorons que depuis l’âge de quinze ans, le jeune Victor s’astreignait à apprendre par cœur, tous les soirs avant de se coucher, trente vers de Virgile pour les traduire le lendemain à son réveil, et qu’il écrivait tous les jours, d’arrache-pied, tout le temps, partout. (1)
Chez les auteurs que nous admirons, nous ne voyons souvent que le résultat (les livres publiés), et nous occultons le labeur, les décennies de travail, les milliers d’heures d’écriture, les ratages, c’est-à-dire les nombreux manuscrits refusés avant la fameuse publication.
Les grands écrivains n’ont pas connu le succès et la gloire par hasard, ni sans fournir d’efforts. Alors pourquoi cela serait-il différent pour nous, aspirants à l’écriture ? Se comparer à Victor Hugo à l’apogée de son succès, alors que nous débutons tout juste dans l’écriture, c’est comme confectionner sa toute première baguette de pain, sans savoir-faire ni entrainement, et se lamenter que personne ne voudra nous l’acheter, alors que le boulanger du quartier qui a plus de vingt ans de métier en vend plusieurs douzaines tous les matins !
La légitimité se construit par l’action
Tout le monde parviendra-t-il à écrire un livre et à le publier ? La réponse est non : en France, sur 1500 manuscrits, un seul fera l’objet d’une publication à compte d’éditeur. (2)
Tout le monde peut-il vouloir écrire un livre et le faire du mieux qu’il peut ? La réponse est un grand oui.
Comme Nadine, nous ne serons pas toujours satisfaits de nos écrits, en tout cas pas tout de suite, mais si nous persévérons, que nous cherchons constamment à les améliorer, alors nous construisons notre propre légitimité. Rien de tel que l’action, c’est-à-dire le fait d’avoir noirci des pages et des pages, d’avoir réussi à se discipliner et écrit régulièrement, de voir ses textes prendre forme, pour avoir la preuve empirique, concrète et visuelle que nous sommes sur la bonne voie.
Cette légitimité-là, bien plus qu’une validation extérieure, venant des autres, sera bien plus solide car elle nous appartiendra et personne ne pourra venir la contredire.
Avoir des doutes : c’est bon signe !
Enfin, un rappel important : le doute accompagne en permanence celui qui écrit. Il nous poursuit tout au long de notre parcours d’écriture, même après des années de pratique, même quand nous avons déjà publié un ou plusieurs ouvrages. De nombreux écrivains reconnus restent pétris de doutes, même en fin de carrière.
Et c’est tant mieux ! Car cesser de se remettre en question risquerait de nous faire stagner – voire régresser – en tout cas de nous éloigner de la réflexion et de la recherche constantes que requièrent la création littéraire. Or, n’est-ce pas le propre de la création que de ne pas se contenter du minimum, de toujours chercher à aller plus loin ?
Bien entendu, il ne s’agit pas de laisser les doutes s’installer trop longtemps, car ils risqueraient de nous paralyser dans notre processus d’écriture, mais bien de trouver un savant équilibre entre la réflexion, la remise en question, l’exploration et l’action – celle de coucher les mots sur le papier, ce qui doit rester la finalité de toute démarche d’écriture.
Prêt à passer à l’action ?
Si vous aussi vous souhaitez apprendre à apprivoiser ce sentiment de doute pour le mettre à profit dans votre création littéraire, à vous sentir légitime dans votre démarche d’écriture, rejoignez notre formation « Devenir un écrivain discipliné » qui vous donnera les outils pour passer à l’action !
Par ailleurs, si comme Nadine et Elisabeth vous vous posez des questions sur l’écriture, écrivez-nous et nous vous répondrons avec plaisir dans ce blog ! 💡
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Sources :
(1) Alain Decaux, Victor Hugo. Editions Perrin, 1984.
(2) Didier Jacob, « Édition : que se passe-t-il dans ces fameux comités de lecture ? », Le Nouvel Observateur, le 25 mars 2017.
un tout grand merci Christine pour cet éclairage sur les questions que je me pose. Ta vision me pousse à poursuivre sur mon chemin
Un grand merci pour ce billet qui m'inciterait presque à oser imaginer que je puisse un jour passer de la nouvelle à la novella et, pourquoi pas, à un roman!